Les visages, de Jesse Kellerman

Publié le par Paco

Les visages
Jesse Kellerman

Éditions Sonatine / 2009
474 pages

Dans cette histoire, le lecteur sera mêlé au milieu de l’art, avec ses passionnés, ses faux-culs, ses riches, ses faux riches ou encore sa belle panoplie d’opportunistes pathétiques et pitoyables. Un milieu fort restreint, un microcosme d’hommes et de femmes qui vivent, pour moi, dans un monde parallèle, une bulle qui n’est pas prête d’éclater (heureusement...). L’art est absolument tout et n’importe quoi, du moment qu’on arrive à y donner de l’intérêt et peut-être du sens.

Ce monde prisé et bien réglé va être ici complètement dérangé par une autre sphère : celle de la violence et de la mort. Ce mélange, cet enchevêtrement va nous parvenir, je dois l’admettre, d’une manière subtile. J’y reviens après.

Nous irons également dans le passé, témoins impuissants d’événements troublants, tristes et écœurants. Ces retours en arrière seront la base de tout.

Ethan Muller, homme prétentieux et pathétique, est galeriste à New-York. Sélectif et intraitable, il faut dire qu’il se débrouille plutôt bien. Parmi toutes les expos qu’il organisera, une seule fera vraiment la différence : des dessins retrouvés dans un appartement miteux et poussiéreux, situé dans la tour d’un quartier tout aussi dégueulasse. Le locataire - certainement l’auteur de ces dessins - ne payait plus les loyers et a disparu du jour au lendemain.

Ces dessins extrêmement troublants, d’une qualité et d’une vivacité surprenantes, suscitant de l’inquiétude et de l’admiration à la fois, vont dès lors être exposés publiquement. Des feuilles A4 par milliers, qui ont toutes un lien les unes avec les autres, dans un ordre bien précis : de la folie pure.

Des visages d’enfants, des courbes inquiétantes, une sorte d’égarement, des traits adroits ou abstraits, des visions débouchant sur de l’objectivité pure, soit énormément de démence mais aussi de génie.

Une fresque gigantesque qu’il faudra décortiquer, morceau par morceau, pour en faire ressortir la folie qui en découle et ainsi la matérialiser. Oui, car les visages d’enfants qui sont si bien représentés sur cette « toile folle » sont de réelles petites victimes de meurtres perpétrés il y a bien longtemps et encore irrésolus.

Un vieil inspecteur de police à la retraite va entrer dans cette danse macabre en découvrant un extrait de cette exposition dans la presse. Les visages innocents qui figurent sur cette œuvre magistrale, il les connaît très bien.

Une enquête à la « cold case » va donc nous tenir en haleine un moment, effectuée par un personnage qui n’est pourtant pas censé le faire, Ethan Muller, le galeriste. D’une part, ce n’est pas son job et, d’autre part, ce n’est pas son genre.

Niveau personnages, l’auteur nous offre un rendu d’une grande qualité. Il prend son temps, il nous conduit dans leur passé, soit il nous donne beaucoup de détails soignés pour nous les décrire. Le personnage d’Ethan Muller est un bon exemple. D’une part, nous en apprenons énormément sur lui, sur sa famille et, d’autre part, c’est lui le narrateur, c’est lui qui nous fait avancer dans cette histoire, dans son histoire.

Le dénouement est d’une belle subtilité mais reste pour moi tout de même un peu plat. Les liens du sang seront ici mis à l’honneur.

Bonne lecture.

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E
Bonjour,<br /> je viens justement de mettre à l'honneur Kellerman sur mon blog, avec la critique de deux de ses romans. J'ai pour ma part plus que grandement apprécié ces "Visages", et l'un de ses grandes qualités étant pour moi qu'il dépasse justement le seul genre du polar. Critique à lire ici : <br /> https://elias-fares.blogspot.fr/2018/01/deux-romans-de-jesse-kellerman.html<br /> <br /> Amicalement,<br /> E.
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